I Argumenter en trois verbes :
Argumenter, c’est vouloir convaincre, persuader, ou délibérer.
Si argumenter consiste à soutenir ou à contester une opinion, cette tentative vise aussi dans le même temps à agir sur le destinataire en cherchant à le convaincre ou à le persuader.
Argumenter, c’est donc justifier une opinion que l'on veut faire adopter, partager en tout ou partie. On cherche alors à convaincre par l'usage de la raison et à persuader en faisant appel aux sentiments et à l'affectivité.
Argumenter, c’est aussi tenir compte de thèses différentes des nôtres, avec lesquelles nous allons entrer en discussion dans une délibération, solitaire (monologue délibératif) ou collective (dialogue).
A) Convaincre
Pour convaincre, le locuteur fait appel à la raison, aux facultés d'analyse et de raisonnement, à l’esprit critique du destinataire pour obtenir son accord après mûre réflexion.
II formule une thèse, appuyée par des arguments, c'est-à-dire des éléments de preuve destinés à l’étayer ou à la réfuter.
Ces arguments sont eux-mêmes illustrés par des exemples variés : tirés de l’expérience personnelle, des lectures, des divers domaines de la connaissance : sciences, histoire, philosophie… Ce peut être des références à d’autres penseurs ou écrivains (citation), à des anecdotes amusantes ou frappantes (paraboles), à la sagesse des nations (proverbes) à des valeurs symboliques ou culturelles partagées (zoomorphisme, mythes)...
Ces arguments sont présentés de manière ordonnée dans le cadre d'un raisonnement (inductif, déductif, critique, dialectique, concessif, par analogie, par l'absurde...) sous forme de plan et d'une progression argumentative où ils sont souvent reliés entre eux par des connecteurs logiques. Les connecteurs les plus importants sont ceux qui soulignent la causalité ou la conséquence.
La thèse s'inscrit dans une stratégie argumentative : développer ou réfuter une thèse, concéder, débattre.
B) Persuader
Quand le discours argumentatif fait appel aux sentiments ou aux émotions du destinataire, il cherche à persuader.
Il s’agit pour l’émetteur de jouer sur des valeurs et des repères culturels communs.
En effet une argumentation met en jeu, de manière explicite ou implicite, un système de pensée. Le locuteur, s’il veut toucher son destinataire, doit s’efforcer de comprendre le système de valeurs de ceux auxquels il s’adresse.
Ainsi la défense d’une thèse s'appuiera sur des principes universels ou du moins en principe partagés par la majorité : la Vérité, le droit au bonheur, l’équité, la sincérité..., ou sur les valeurs admises par un groupe social déterminé : l’honneur, le courage, la probité, le travail, le patriotisme…
Cette thèse s’appuie également sur des références culturelles communes qui font naître une complicité propice à l’adhésion : jeux de mots, traits d'esprit, intertextualité, connotations, détournements, allusions…
Le discours va se faire à la fois expressif et impressif, il va essayer de transmettre des émotions fortes, d’impressionner le destinataire pour agir sur lui.
Pour cela, il a recours à des procédés stylistiques
· Implication des destinataires :Le locuteur doit impliquer ses destinataires, leur faire considérer que sa thèse est aussi la leur, qu’ils partagent les mêmes combats et les mêmes intérêtsð adresse au destinataire : utilisation de la 2ème personne (« tu » ou « vous ») ou de la 1ère pers. plur, « nous » qui crée une communauté d’intérêt.
· questions rhétoriques ou fausses questions sont simplement destinées à animer le discours et à varier le mode de l’affirmation.
· modalisation forte pour provoquer un phénomène d’identification à ses vues. L’adhésion recherchée est plus viscérale que réfléchie. Nous assistons alors à une. Le locuteur s’implique fortement dans son énoncé, il amplifie ses jugements par le recours à des termes mélioratifs ou péjoratifs, à des adverbes d’intensité, à des images qui heurtent ou font rêver. Il spécule le plus souvent sur des réactions primaires : joie, peur, tristesse ou colère…Pour persuader son lecteur ou son auditoire, le locuteur va jouer sur les émotions fortes de l’indignation ou de l’enthousiasme. Il peut exciter la pitié pour les victimes, l'indignation devant l’inacceptable, la révolte contre l’injusticeð recours fréquent au registre pathétique.
· Des champs lexicaux : champ lexical de la douleur, de la plainte. Recours à un vocabulaire partagé avec l’auditoire : familiarité, jargon, Les oppositions entre ombre et lumière, civilisation et barbarie, raison et folie…
· Des figures de style :
- d'insistance (répétition, anaphore, gradation, pléonasme),
- d'opposition (antithèse, oxymore).
· Ponctuation expressive : recours aux exclamations et interrogations qui trahissent l’affectivité débordante ou la volonté d’animer le propos.
· Des rythmes :
- souvent binaires (affectifs) ou cumulatifs (extériorisation d’un trop-plein intérieur).
- L'utilisation d'effets syntaxiques : phrases construites selon un rythme fortement marqué, brusques ruptures rythmiques pour surprendre ou choquer le destinataire, (anacoluthe) phrases s'achevant sur une chute, c'est-à-dire une conclusion inattendue. Art de la formule aux endroits stratégiques du propos (parallélisme, antanaclase, chiasme, paronomase…).
- Utilisation de rythmes ternaires pour créer des moments oratoires équilibrés après
l’expression vive des sentiments. Recours à des formes incantatoires (anaphores, allitérations, paronomases).
C) Délibérer
Délibérer, c'est examiner les différents aspects d'une question, en débattre, y réfléchir afin de prendre une décision, de choisir une solution. C’est donc se confronter à ses propres objections ou à celles d'autrui, avant de construire sa propre opinion. Cette nécessaire étape de la réflexion personnelle permet de considérer l'avis d'autrui et de peser la vérité (ou l’accord au réel) de différentes positions avant de décider.
La délibération est également essentielle au débat public dans une démocratie. Au cours d’un procès avant la sentence, les jurés sont amenés à délibérer.
L'essai, le dialogue ou l'apologue sont des genres littéraires particulièrement adaptés à l'expression d'une délibération.
II Les types d’arguments
Par ex. : Fumer est dangereux pour la santé, c'est ce que nous démontre le rapport sur la santé des Français rédigé par les professeurs ...
"L'usage du tabac est la première cause des cancers du poumon et de la gorge".
L'ironie est une arme essentielle de la stratégie argumentative parce qu'elle rend le récepteur complice, qu'elle l’oblige à parcourir la moitié du chemin dans l'adhésion à la thèse. L’opinion se dissimule en effet derrière une formulation strictement inverse ; aussi le lecteur doit-il être attentif et réagir aux indices qui la lui indiquent :
- une logique absurde : elle consiste à relier une cause donnée et une conséquence sans rapport avec elle.
L'absurdité marquée de cette relation doit heurter le lecteur. Par exemple, Montesquieu, dénonçant le racisme primaire s'exprimait ainsi : "[Les nègres] ont le nez si écrasé qu'il est presque impossible de les plaindre".
- la caricature poussée jusqu’au cynisme : Le lecteur est averti par l'énormité du propos ou son caractère franchement ignoble. Montesquieu : "Le sucre serait trop cher si l'on ne faisait travailler la plante qui le produit par des esclaves."
- l'antiphrase : c'est le procédé essentiel. Il s'agit ici de juger un phénomène à l'inverse de ce qu'on attendrait. Devant les gribouillis d’un apprenti écrivain, le critique va encenser le « caractère admirable » de la production. Comme le compliment est public, forcé par l’exagération et le ton, il ne laisse aucun doute sur les intentions de celui qui le prononce au point que le récipiendaire en est souvent marqué à vie.
III Genres et registres de l’argumentation
Genres et registres sollicités
On a l’habitude de distinguer entre argumentation directe (explicite) ou indirecte (implicite) et de rattacher les genres
A) L’argumentation directe ou explicite
1) L’essai ou le traité
Un essai est un ouvrage qui propose une réflexion, qui expose un point de vue personnel sur un thème dans quelque domaine que ce soit
L'essai appartient essentiellement au registre didactique puisqu’il propose un enseignement ou un partage de connaissances en un discours structuré sur un sujet donné.
La forme de l’essai est très libre, c’est pourquoi les auteurs y recourent si souvent.
Exemples : Les Essais de Montaigne, les Pensées de Pascal, Comme un roman de D. Pennac, ou Introduction à la littérature fantastique de Tzvetan Todorov (1970)
L’essai se caractérise surtout par un ton personnel : l’essayiste cherche à marquer son lecteur par un style bien à lui qui rende le propos attrayant et accessible et surtout qui lui permette de se distinguer des prédécesseurs ou des adversaires. « J’ai naturellement un style comique et privé, mais c’est d’une forme mienne » (I, ch. 60) « Le parler que j’aime, c’est un parler simple et naïf, tel sur le papier qu’à la bouche ; un parler succulent et nerveux, court et serré… » (I ch. 26) écrit Montaigne.
2) le dialogue d’idées
Une argumentation peut prendre la forme d'un dialogue entre deux ou plusieurs personnes.
Le dialogue est un moyen essentiel pour confronter des idées.
Le dialogue philosophique est hérité de l’Antiquité. Platon, philosophe grec du V° siècle av. J.-C., présente l’enseignement de son maître Socrate sous forme de dialogues avec ses élèves et ses adversaires, selon la méthode de la « maïeutique » (ou accouchement) qui, par des questions appropriées, faisait naître les vérités qu'ils portaient en eux sans le savoir.
Ce type de dialogue suppose deux interlocuteurs bien disposés, qui font avancer la conversation de manière à exposer dans son entier le domaine examiné. Chez Socrate, il ne s’agit pas de débattre, mais de pratiquer un dialogue dialectique où les interrogations croisées conduisent à faire émerger une réponse. Sa visée est essentiellement didactique car, utilisé par un maître habile, il sert à transmettre un savoir.
Ce dialogue philosophique a été particulièrement utilisé dans le combat philosophique du siècle des Lumières.
En littérature, le dialogue d'idées s'inscrit dans pratiquement tous les genres : le théâtre, le roman ou la nouvelle, l’essai. Par exemple il sert de fil conducteur à plusieurs niveaux dans le Supplément au voyage de Bougainville de Diderot, sorte d’essai polémique sur la civilisation et la morale sexuelle, l'apologue, la fable ou le conte philosophique Candide discute avec le nègre de Surinam chez Voltaire, le loup dispute avec l’agneau ou avec le chien dans les Fables de La Fontaine…
Le dialogue se caractérise par la polyphonie.
3) la lettre
La lettre peut être un genre argumentatif dans la mesure où il s’agit d’un dialogue différé. Elle peut passer du domaine privé au domaine public, devenir lettre ouverte, forme commode pour exposer des idées.
Exemples
· Epîtres de Saint Paul qui exhortent, enseignent, commentent, précisent le dogme,
· Les Provinciales de Pascal, Les Lettres philosophiques de Voltaire : La lettre est un moyen d’exprimer haut et fort des positions politiques.
· le « J’accuse » de Zola reste un modèle de lettre ouverte.
B) L’argumentation indirecte ou implicite
Les fables, les contes (surtout les contes philosophiques), les exempla, présentent tous un mode de fonctionnement allégorique qui autorise une argumentation indirecte.
Ils visent en effet à convaincre et persuader le lecteur indirectement, par un récit fictionnel arrangé, ordonné, destiné à présenter des idées, des valeurs symboliques, à travers
des personnages de fiction (hommes, dieux, animaux, végétaux...), à la fonction référentielle et symbolique s’inscrivant dans une tradition culturelle,
des situations initiatiques qui révèlent cette valeur symbolique,
des dialogues qui créent des pauses dans le récit, permettent souvent de confronter différentes opinions ou de tirer des enseignements.
Dans cette argumentation indirecte, le rôle de l'implicite est souvent essentiel. L'apologue suggère souvent plus qu'il n'affirme une idée. II recourt à la légèreté de l’allusion au détriment de la lourdeur de la démonstration. Il se cache de la censure en attribuant ses critiques à un tiers ou en les dissimulant dans des propos codés ou ironiques comme Voltaire.
Le grand mérite de cette forme d’argumentation est d’aiguiser la curiosité du lecteur, dont la complicité est requise pour deviner les intentions de l'auteur. « Les meilleurs livres sont ceux qui font faire la moitié du chemin au lecteur » ou « Le moyen d'ennuyer est de vouloir tout dire » a prévenu Voltaire.
1) L’apologue ou la fable
L'apologue (du grec apologos, récit) est un court récit en prose ou en vers, dont on tire une instruction morale, c’est donc au sens strict un synonyme de « fable ». Plus généralement, il désigne un récit pédagogique à des fins morales, mais parfois aussi politiques ou religieuses. La fable a aussi le sens de fiction mensongère. Le récit d'une anecdote mettant en scène des animaux, ou parfois des végétaux, personnifiés, a toujours servi à illustrer des leçons de sagesse pratique. Le genre provient de deux grandes traditions : l'occidentale représentée par les fables grecques attribuées à Ésope, et par Phèdre à Rome ; l'orientale qui prend racine dans le Pañchatantra sanskrit et qui nous est parvenue par Bidpaï en Inde et le livre de Kalila et Dimna en Perse et dans les pays arabes.
Dans l'apologue traditionnel, la moralité est explicitement formulée. II n'en va pas toujours de même dans les genres narratifs proches de l'apologue : la fable, l'exemplum, le conte (en particulier philosophique).
Chez La Fontaine, comme chez ses prédécesseurs, la fable est un récit fictionnel court qui use parfois du merveilleux (d'où l'adjectif « fabuleux). Le récit, sorte de mini conte, suit souvent le schéma narratif du genre : situation initiale perturbée par un événement déclenchant une mise en route, péripéties formatrices, situation finale dont la mise en perspective avec le début permet de tirer une sagesse.
La fable, au XVIIe siècle, est un genre pédagogique : l'élève doit mémoriser la morale, apprendre la rhétorique en composant à son tour des récits illustratifs accompagnés de leur moralité conséquente.
C’est La Fontaine qui porte le genre à son apogée.
2) L'exemplum (exempla au pluriel) désigne d’abord un exemple à suivre, tirés de la Bible (Ancien Testament), des auteurs de l'Antiquité classique, et des cultures orales : folklore, récits hindous et arabes, mais aussi une ressource de la rhétorique pour persuader.
3) Le conte, et particulièrement le conte merveilleux, est d’abord un genre oral, un récit hérité de la tradition, dont le schéma narratif reste immuable mais non la mise en forme. Il appartient au monde de la fiction avec sa formule magique « Il était une fois » ; il a souvent un aspect didactique ou moralisante qui répond à sa fonction initiatique. Le petit Chaperon rouge La Belle au bois dormant (cf La psychanalyse des contes de fées de Bruno Bettelheim)
Dans les sociétés traditionnelles, les contes étaient destinés aux adultes. C'est seulement à partir du XVIIe siècle en France que les contes ont rejoint la littérature de jeunesse.
4) Le conte philosophique abondamment illustré par Voltaire
C’est à la fois un conte, un récit souvent proche, dans sa structure, du conte traditionnel : un héros, une quête, des obstacles, des éléments merveilleux ou exotiques (Voltaire est allé le plus souvent les chercher dans le monde oriental, le contrepoint de la raison philosophique). Il exploite en tant que conte le plaisir du récit et cherche ainsi à captiver le lecteur. D’ailleurs dans la stratégie voltairienne, ce recours aux charmes du merveilleux, du récit mouvementé et de l’intrigue sentimentale est destiné à éclairer les nombreux lecteurs qui auraient été rebutés par l’aridité des essais ou des traités.
Ce conte est donc également philosophique, car il cherche au final à éveiller la réflexion critique du lecteur sur des questions d’actualité plutôt subversives à l’époque : critique de la religion, du pouvoir absolu, de la politique, de la morale traditionnelle, promotion de la science et de la raison… ðles contes philosophiques de Voltaire illustrent bien des débats du siècle des Lumières et sont représentatifs des multiples combats menés par l'auteur, notamment pour le respect des droits, la tolérance, la liberté, etc. Et comme tous les masques sont possibles dans le conte (merveilleux, appel à un narrateur fictif, exagération, mensonge...), ce genre lui permet d'exprimer des idées contestataires (Voltaire dénonce la justice, le pouvoir, les abus...) en échappant à la censure.
5) La parabole
Dans les Évangiles, le Christ délivre son enseignement spirituel en passant par des paraboles, récits qui utilisent des scènes quotidiennes bien connues de l’auditoire (renvois aux scènes pastorales ou agricoles, à la vie de famille, à l’exercice du pouvoir) mais dont le sens est allégorique
6) L’utopie et la contre-utopie
Ce mot est constitué du nom grec topos qui signifie « lieu » et du préfixe « u » qui peut avoir deux origines : le préfixe privatif « ou », dans ce cas « utopie » désigne un lieu qui n’existe pas, ou le préfixe « eu », utopie signifierait alors un lieu heureux. Ces deux sens permettent de définir l’utopie comme un monde idéal, heureux qui n’existe pas. L’utopie est donc un récit fictionnel qui obéit à des règles précises. Son action se situe dans un lieu clos sur lui-même et isolé du monde, souvent une île ou un lieu inaccessible (les montagnes où se cache l’Eldorado de Candide).
Cette clôture du lieu permet de mettre en scène un monde autonome qui, privé du contact avec notre monde, a développé sa propre organisation, ses propres valeurs et ses propres règles. L’utopie fonctionne donc sur le mode du laboratoire. C’est un monde simplifié qui imite le monde réel mais en réinventant ses règles de fonctionnement pour mettre en valeur ses dysfonctionnements. L’utopie présente un tableau dual : elle propose et expérimente un monde meilleur, mais dans son évocation, le lecteur perçoit aussi la critique de son propre monde. Sa fonction est donc avant tout critique. C’est Thomas More qui fonde le genre en écrivant, en 1516, Utopia. Du XVIe au XVIIIe siècle, Rabelais, Montesquieu, Voltaire veulent démontrer qu’une organisation sociale autre, plus humaniste, plus
bénéfique est non seulement souhaitable, mais possible. L’exploitation littéraire de l’utopie a permis ainsi une réflexion philosophique et politique.
Au XXe siècle, des auteurs comme Orwell et Huxley ont fait basculer l’utopie dans la contre-utopie. En gardant les mêmes caractéristiques narratives (sauf que le lieu clos devient l’ensemble de la planète), ils décrivent un monde qui passe sous la domination des totalitarismes : un petit groupe d’hommes impose sa loi tyrannique à la masse, des principes appliqués sans discernement, jusqu’à l’absurde, en arrivent à priver l’individu de toute liberté. C’est un monde où l’adage de Montesquieu prend tout son sens : « Le mieux est l’ennemi mortel du bien ». Les univers ainsi créés refusent la différence, l’individualité humaine. La science-fiction s’est aussi emparée de ce modèle avec les risques de la mécanisation, de l’uniformité. La contre-utopie a donc des visées critiques.
Si la fable et l’apologue délivrent, de manière le plus souvent explicite, une moralité ou une sagesse ; le conte philosophique, l’utopie, ne délivrent, pas forcément de leçons, mais demandent une lecture au second degré, une mise en perspective pour bien en comprendre le sens.
Comme on a pu le voir dans cet exposé, l’argumentation est protéiforme. Elle répond fondamentalement au besoin humain d’avoir raison.
Quelques citations pour finir :
« Le philosophe ne fait que convaincre, l'orateur, outre qu'il convainc, persuade. »
Fénelon Dialogues sur l'éloquence
« La parole a beaucoup plus de force pour persuader que l'écriture. »
René Descartes Lettre à Chanus
« L'art de persuader consiste autant en celui d'agréer qu'en celui de convaincre. »
Blaise Pascal De l'esprit géométrique
« Pour convaincre, la vérité ne peut suffire. »
Isaac Asimov
« Il faut donc nous méfier de ceux qui cherchent à nous convaincre par d'autres voix que celle de la raison. »
Primo Levi Les naufragés et les rescapés
« Le positivisme est indispensable aux orateurs. Qui partage ses pensées avec un public pourra convaincre à la mesure de ce qu'il paraîtra lui-même convaincu. »
Jonathan Swift
« Ne faut-il que délibérer, la cour en conseillers foisonne ;
Est-il besoin d'exécuter, l'on ne rencontre plus personne. »
Jean de La Fontaine